Statuons au départ qu’il n’est plus approprié de parler de déchets, cette matière rebutante qu’on entassait jadis « à la dump », et que l’on brûlait. Dans ma jeunesse, on s’y risquait, malgré l’interdit de nos parents, avec des « slingshots », pour chasser les rats qui pullulaient dans ce garde-manger à leur disposition. Cette vision a bien changé depuis.

 

Nous avons emboité le pas

On nous a d’abord demandé de séparer le papier journal et d’aller le porter nous-mêmes dans des entrepôts. Puis, on en a fait la cueillette pour le recycler à plus grande échelle : le reste au dépotoir. Aujourd’hui, on a des bacs verts pour les matières recyclables, des bacs bruns pour les matières organiques et des bacs noirs pour le reste.

En 2018, la part des déchets aux émissions de GES au Québec était de 5,1 %[1].

 

À quoi sert la cueillette du bac brun ?

Aujourd’hui, les bacs bruns[2] ont de la difficulté à s’imposer car moins de la moitié des 1 100 municipalités du Québec ont un service de cueillette des résidus alimentaires et verts. En 2018, seulement 31 % de la matière organique était recyclée, le reste étant éliminé. De cette matière organique, on produit deux choses : des fertilisants et du biogaz.

Avec des procédés plus efficaces que celui du compostage amateur, la matière organique est transformée en compost utilisable en agriculture, ou plus près de nous, dans les potagers et les platebandes. Élément intéressant : plusieurs municipalités redonnent cet « or brun » à leurs citoyens au printemps pour leur utilisation personnelle.

Mais aussi, puisque cette matière dégage du méthane, on en profite par le procédé de la biométhanisation, pour capter ce gaz des plus nuisibles à l’environnement et pour le transformer en biogaz qui remplacera des combustibles fossiles, devenant ainsi une énergie renouvelable. Ce biogaz servira à produire de l’énergie pour chauffer les bâtiments, créer de l’électricité, etc. Les résidus résultant de ce procédé – le digestat – seront utilisés comme fertilisant pour les sols agricoles.

Québec estime que « le détournement de l’élimination des matières organiques liées à la Stratégie permettra d’éviter annuellement l’émission d’un million de tonnes de GES […] ».[3]

 

Et pour le verre, le métal et le plastique ?

Si l’habitude d’utiliser le bac vert est bien implantée, le taux de récupération demeure insuffisant. Le nombre de contenants à remplissage unique de bière et de boissons gazeuses mis en marché en 2018 a atteint 2,28 milliards. L’aluminium constituait 80,5 % de ces contenants, suivi par le plastique 12,2 % et le verre 7,3 %. Le taux de récupération pour chacun oscillait autour de 68 %.[4]

À partir de 2022, tous les contenants à boire en plastique, verre ou métal de 100 ml à 2 litres, seront consignés au Québec. Les consommateurs devront alors rapporter les contenants de plastique, de verre (dont les bouteilles de vins), de métal (dont les cannettes de bières, de boissons gazeuses ou de jus), aux points de consignes. Vous obtiendrez 25¢ pour chaque bouteille de vin retournée et 10 ¢ pour chaque autre contenant incluant le carton. Concrètement, vous paierez le 25 ¢ ou le 10 ¢ en achetant le produit mais vous serez remboursés lors de leur retour.

 

Les entreprises mises à contribution

Depuis 2006, les entreprises doivent payer une redevance aux municipalités pour assurer la gestion des matières résiduelles. À partir de 2022, un pas de plus sera franchi au niveau de leur responsabilisation: « les entreprises qui mettent sur le marché des contenants, des emballages, des imprimés et des journaux seront responsables de leurs produits du début à la fin de leur cycle de vie ». « Les producteurs devront atteindre des objectifs de récupération et de recyclage fixés par règlement. Des pénalités seront prévues en cas de non-atteinte des objectifs »[5].

 

Une autre vision à adopter

Notre conception des déchets évolue. Bac noir, puis bac vert et aujourd’hui bac brun. Consigne restreinte aujourd’hui, consigne généralisée demain.

On ne parle plus de déchets à se débarrasser mais plutôt de ressources à valoriser. L’atteinte de la carboneutralité pour 2050 nous oblige, ici aussi, à modifier certaines de nos conceptions et de nos modes de vie.

 

Texte de Yves Nantel
Bénévole et militant de longue date

 


[1] Source : Émissions annuelles de GES au Québec de 1990 à 2018, Inventaire québécois des émissions atmosphériques (IQEA), 04/11/2020

[2] Source : Stratégie de valorisation de la matière organique, ministère de l’Environnement et de la Lutte aux Changements climatiques, 03/07/20

[3] Source : idem à la note 2

[4] Source : RECYC-QUÉBEC, Bilan 2018, 2020

[5] Source : Québec annonce une réforme du système de collecte sélective, ministère de l’Environnement et Lutte contre les changements climatiques, 11 février 2020.