Dans les trois dernières chroniques, j’ai tenté de démontrer que la réduction impérative des GES nous oblige déjà à adopter de nouveaux modes de vie. Mais cela ne fait que commencer.

 

Limiter notre consommation de matières premières

Diminuer notre empreinte écologique de manière à limiter le réchauffement à 2 ℃, idéalement 1,5 ℃, tel qu’adopté par 194 pays lors de l’Accord de Paris en 2015, nous amène sur la voie de l’allongement de la durée de vie des produits. Pour ce faire, le concept de développement durable implique l’application des 3 R : la Réparation, le Réemploi et le Recyclage. Ces trois moyens font aussi partie des stratégies de l’économie circulaire pour repenser le modèle de développement économique actuel.

L’idée ici est de découpler l’extraction des matières premières de la croissance. En d’autres mots, la satisfaction de nos besoins doit s’effectuer avec le minimum de ressources naturelles tout en polluant le moins possible parce que la planète a atteint ses limites à les combler.

 

Allonger par la réparation

« Ça ne vaut pas la peine de le faire réparer car ça va vous coûter plus cher que d’en acheter un autre ». Il faut rendre cette réponse dépassée.

Devant cette réalité, on peut adopter quelques attitudes. D’abord, tenter de réparer l’objet soi-même. Oui, c‘est toujours possible. Ça dépend. Encore faut-il y consacrer le temps. Oser démonter le bidule, consulter les plans si disponibles, suivre un tutoriel sur internet. Ceci s’applique autant pour un vêtement, une paire de bottes que pour sa cafetière, sa perceuse ou sa scie à chaîne et même sa laveuse à linge. Mais cela demande de changer d’attitudes. Et ça c’est difficile. Ou faire appel à des réparateurs. Surtout ne pas mettre au rebut.

 

Allonger par le réemploi et l’emploi intensif

Si le bien est toujours utile et en bonne condition, l’option sera de le confier à un comptoir d’entraide qui en fera une inspection, un nettoyage et un rafistolage si nécessaire. Votre vêtement, votre article ménager, le jouet de votre jeune, votre mobilier ou appareil ménager retrouvera ainsi une deuxième vie. Il en est de même lorsqu’offert en vente lors des ventes de garage permises de manière saisonnière.

Et à l’inverse, on peut opter nous-mêmes pour l’achat de l’usager au lieu du neuf.

Dans le sens de l’allongement, il y a aussi l’emploi intensif. Quand on y pense bien : est-il normal que nos tondeuses à gazon ne soient utilisées que quelques fois durant l’été et que le reste du temps elles soient remisées dans le cabanon ? Ce raisonnement peut évidemment s’appliquer à plus d’un bien.

Mais il faudrait mieux rendre accessible ce concept que certains appellent une économie de la fonctionnalité. On ne nous vendrait plus la possession d’un bien mais son usage. Le bien serait utilisé au maximum et le fabricant ou le commerçant qui l’offre aurait tout intérêt à posséder des produits de qualité, durables, réparables et répondant aux besoins. Résultante : moins de CO2 dans l’atmosphère. L’offre du libre-service de vélos Bixi à Montréal et de l’autopartage de Communauto dans plusieurs villes canadiennes en sont des exemples intéressants.

 

Allonger par le recyclage.

« Notre planète est, maintenant, seulement 8,6 % circulaire », titre Circle Economy dans son dernier rapport en date du 21 janvier 2020. Ceci implique que le reste est considéré des déchets et voué à l’enfouissement.

Au Québec, nous avons en place des infrastructures de recyclage : le bac vert pour le papier, les contenants de plastique, métal et verre, les écocentres pour les matériaux de bois, de métal, de plastique, du carton et autres, les dépôts de « Serpuariens » pour les appareils électroniques. Il faut les utiliser au maximum.

 

L’obsolescence programmée en appui aux 3 R

Dans cette optique de la nécessité de l’allongement de la durée de vie des produits, il devient impérieux de légiférer pour mettre un frein à l’obsolescence programmée.

Une telle législation devrait impérativement: a) inclure l’interdiction de planifier la durée de vie des produits afin de favoriser leur remplacement b) circonscrire les paramètres de la publicité de façon à minimiser les effets de mode, c) exiger des indications de durée de vie des produits, des manuels et des outils de réparation ainsi que l’assurance d’avoir des pièces de rechange à prix abordable.

Promis avant la pandémie, on doit dépoussiérer le projet de loi sur l’obsolescence programmée et le mettre à l’avant-scène car cette loi ferait partie de l’arsenal des moyens de lutte contre les changements climatiques.

 

Changer de paradigme

Nous sommes au cœur d’une grande réflexion mondiale sur la façon de nous réconcilier avec la nature. L’application des concepts du développement durable et de l’économie circulaire, entre autres, font partie de cette tentative de développer un nouveau paradigme à savoir une autre manière de produire et de consommer afin de tenir compte des limites de notre planète. La partie n’est pas gagnée d’avance.

 

 

Texte Yves Nantel
Bénévole et militant de longue date