Nous attendons plus !

Dans son budget 2013-14, le gouvernement annonce l’économie de 336 millions $ par diverses mesures, dont l’abolition de la règle de 15 ans qui retardait l’entrée sur le marché de certains génériques au Québec. Enfin. Sauf que le gouvernement pourrait sauver entre 1 et 3 milliards $ en faisant davantage.

Car il est urgent de faire plus et mieux au chapitre du contrôle du coût et des dépenses en médicaments dans notre province. Comment être satisfaits de payer ici 38% de plus pour nos médicaments que la moyenne des pays de l’OCDE ?

La facture en médicaments s’élève à plus de…

  • 1000 $ par personne au Québec
  • 700 $ en Colombie-Britannique
  • 440 $ en Suède
  • 270 $ en Nouvelle-Zélande

Les dépenses en médicaments représentent 20% de nos dépenses de santé (contre 16% dans le reste du pays). Et Québec solidaire révélait récemment que la Suède, avec ses 9,5 millions d’habitants dépense moitié moins que nous pour ses médicaments (3,7 milliards$ et nous, 7 milliards$). Bref, il y a urgence d’agir, pour nos finances publiques et personnelles.

Comment ? La voie que nous privilégions est celle de l’adoption d’un régime entièrement public d’assurance médicaments.

Pourquoi ? Afin d’avoir le contrôle de 100% de nos achats en médicaments et ainsi, un pouvoir de négociation beaucoup plus fort qu’actuellement.

Le régime hybride public-privé actuel donne des résultats désastreux. Ainsi, par exemple, les 57% de Québécois assurés par leurs assurances collectives ont des prix jusqu’à 80% (voire davantage) plus élevés que ceux assurés par la RAMQ parce que les honoraires des pharmaciens ne sont pas réglementés au privé.

Ils  n’ont pas non plus la gratuité des médicaments pour leurs enfants. En plus, ces assurés paient une taxe de 9% sur leurs primes d’assurance et assument par leurs impôts le déficit annuel de 2 milliards $ de la portion publique du régime d’assurance-médicaments.

Pour leur part, les 43% de Québécois assurés par la RAMQ profitent de la gratuité des médicaments pour leurs enfants, de primes en fonction de leurs revenus (même si la prime maximale est trop vite atteinte), d’honoraires fixes avec les pharmaciens, …

Il nous apparaît donc qu’il y a urgence – urgence d’agir pour contrôler l’explosion des coûts de nos médicaments et pour garantir l’accès de tous les Québécois à des médicaments abordables.

Pour cela, comme nos dirigeants désirent souvent le faire, il suffit d’imiter des pays comme la France, le Royaume-Uni, la Suède ou la Nouvelle-Zélande.

Ces pays ont adopté un régime entièrement public d’assurance médicaments, cette locomotive qui leur a permis de mettre en place toute une série de mesures afin de reprendre le contrôle sur leurs dépenses en médicaments : appels d’offre, négociations croisées, prix de référence, etc. Des mesures qui donnent des résultats : selon des chercheurs, les prix dans ces pays sont de 24% à 48% moindres qu’au Québec et la croissance annuelle des coûts y est de 2 à 3 fois inférieure à la nôtre.

À noter : ces pays attirent néanmoins de 35% à 400% plus d’investissements en recherche et développement pharmaceutique que le Canada. Alors que l’on apprend que le régime fiscal canadien est l’un des plus généreux au monde pour les entreprises (classement 2012 de la firme PwC), ne pleurons donc pas d’avance sur le sort de notre industrie pharmaceutique advenant l’adoption d’un nouveau régime d’assurance-médicaments.

Certains demanderont : pourquoi ne pas simplement réformer notre régime actuel, sans en abolir la partie privée ? Réponse par un exemple : le Bureau de la concurrence a démontré, dans une étude de 2008, que lorsque le prix des génériques est passé de 63% à 50% du prix de l’original au Québec et en Ontario,  il a simultanément augmenté pour les assurés des régimes privés…

Combien peut-on aller chercher avec un régime entièrement public d’assurance médicaments au Québec? Entre 1 milliards$ et 3 milliards$, selon les sources et l’ampleur des mesures qui pourraient accompagner un tel régime. Largement assez d’argent pour abolir complètement la taxe santé, et beaucoup plus encore.

Plus de 276 groupes communautaires, syndicaux et experts du domaine de la santé ont adhéré à notre campagne et manifesté leur appui à l’instauration d’un tel régime.

Ce sont des regroupements nationaux d’organismes communautaires, des fédérations syndicales du domaine de la santé, des chercheurs, médecins et autres parties préoccupées par la situation actuelle et convaincues que le début d’une solution réside dans le fait de contrôler 100% des achats en médicaments dans la province.

Nous pressons le gouvernement d’étudier avec intérêt et diligence toute proposition ou projet de loi allant en ce sens, pour le mieux-être des Québécois et des finances publiques.

 

Elisabeth Gibeau, Union des consommateurs
11 décembre 2012